Bien avant Zinedine Zidane, et alors que Michel Platini était encore jeune joueur du bataillon de Joinville, régnait sur la planète football du jeune amateur de foot que j’étais, un joueur extraordinaire que nous surnommions tous « Pépelle ».
Les récréations à Hoche se faisait sur l’immense espace entre les bâtiments et le stade de sport du lycée, ou quatre buts de hand-ball servaient à des parties endiablées qui durait de 10 minutes à plusieurs heures, au gré des horaires des cours . Ces terrains en dur, nous permettaient d’éclater nos pantalons ou jeans régulièrement, et fournissaient l’infirmerie du lycée abondamment, pour de menus bobos.
Le surnommé Pépelle était prodigieux, capable de marquer dans toutes les positions , faisant des « bicyclettes » dos au but, et driblant d’une façon diabolique tous les pauvres élèves qui essayaient de lui prendre le ballon.
Quand nous faisions des championnats inter-classes, à 7 contre 7 , les classes littéraires dont je faisais partie étaient souvent surclassées par les sections C ou D (maths et scientifiques), mais seule la classe C, où opérait Pépelle, était invincible et gagnait tout.
Bien entendu, il faisait partie de l’équipe fanion du lycée, qui ces années-là (1974-1975 ) était en tête des championnats inter-lycées. Ce garçon méritait sans doute d’intégrer, comme on le fait de nos jours, une école de football dans un centre de formation de club. Mais à cette époque, à part la grande équipe de Saint-Etienne qui commençait à naître, ces centres étaient pour la plupart embryonnaires.
Nous avions donc commencé à ne plus vouloir être ridiculisés par ce joueur tellement au dessus du lot, en inventant un dérivé de la Sioule et du Rugby, qui consistait à se battre pour le ballon avec tous les élèves en récréation , c’est à dire des masses de 150 à 300 élèves, courant tous en même temps sur le même porteur du ballon, et au dernier moment, avant que cinquante mains ne nous agrippent, nous lancions à un autre élève de notre classe la balle pour éviter d’être piétinés et broyés. Il n’y avait ni points, ni buts marqués, mais simplement le droit de garder le ballon au moment où la cloche retentissait, pour remettre en jeu le trophée à la récréation suivante.
Bien entendu, dans cette mêlée épouvantable, Pépelle n’était plus capable de faire briller sa technique et il ne pouvait résister plus de trois secondes avec le ballon.
Je pense que ces jeux ont dû disparaître dans les années 1980, car le nombre d’éclopés était redoutable. Les professeurs qui nous accueillaient à 14 heures se demandaient souvent ce qui nous avaient mis dans un tel état, et ma mère ne comprenait pas pourquoi elle devait changer si souvent mes chaussures de ville.
Je garde de ces contacts virils une nostalgie d’adolescence.
Philippe Cubaud, ancien de Hoche (1973-1977)