Conférence prononcée par Erik Linquier, président d’Aquavesc, le 5 décembre 2019 à l’amphithéâtre du lycée Hoche.
Versailles est probablement une des plus anciennes villes françaises à avoir bénéficié de la distribution collective d’eau. Nous verrons qu’une infrastructure d’un âge vénérable est bien préparée pour répondre aux enjeux actuels de la distribution d’eau dans son secteur.
Cette conférence organisée le 28 mai 2019 par Alexis Grange, élève en BCPST, rendait compte de quelques projets en Île de France prenant en compte les contraintes de développement durable.
Thèmes abordés:
Quel avenir pour les terres d’Ile-de-France?
Quelles perspectives pour l’agriculture et l’alimentation de demain?
Comment mettre en valeur une agriculture et une alimentation locales?
Des solutions pour nourrir la planète durablement.
La conférence rassemblait:
Elise Simon, ingénieure agronome, chef du service Économie et Filières de la Chambre d’Agriculture d’Île-de-France,
David Montagne, maître de conférences à AgroParisTech en science du sol,
Alexandre Rueche, agriculteur céréalier, ancien Président du Syndicat agricole des Jeunes Agriculteurs d’Île-de-France,
Léna Girard, chargée du développement d’une monnaie locale à Paris.
De nombreux participants ont posé des questions aux intervenants.
Thomas LEGRAIN, président honoraire, consultant en stratégie, et grand adepte de l’ultra-trail, nous fera partager son expérience de l’apport de la pratique sportive sur l’efficacité professionnelle:
Jeudi 21 février 2019 à 19h 30
Amphithéâtre du lycée Hoche
Comment le sport peut-il vous aider à être plus performant dans votre travail ? L’exemple de l’ultra-trail, une école du dépassement de soi
Les personnes extérieures au lycée qui souhaiteraient assister à cette conférence doivent se signaler à cette adresse au plus tard le 20 février à 20h, en vue des formalités Vigipirate.
Esther DUFLO, ENS ULM (Lettres et sciences), Agrégée d’économie, Docteur du Massachusetts Institute of Technology (MIT) en Economie, est titulaire de plusieurs prix internationaux et professeur au MIT (chaire de réduction de la pauvreté et économie du développement) ». Pendant la présidence de Barack OBAMA, elle a fait partie du President’s global Development Council. Elle est membre de l’Académie américaine des sciences. Cette grande économiste mondialement reconnue est venue le 16 novembre 2017 à Hoche nous parler de la lutte contre la pauvreté, à travers les expériences éducatives, qu’elle dirige, de plusieurs pays.
Les sièges de l’amphithéâtre n’ont pas suffi à accueillir les centaines de participants, anciens professeurs, anciens élèves, et surtout lycéens des classes terminales (dont le programme inclut le sujet de la conférence) et de prépas. Les plus jeunes ont donc suivi assis sur les marches, mais tous ont été vivement intéressés par l’exposé et les aides visuelles.
1. Les origines de l’orientation d’Esther DUFLO
La vie familiale a été un facteur important de l’orientation d’Esther DUFLO vers l’économie de la pauvreté : sa mère a beaucoup travaillé dans des associations humanitaires, et en parlait en famille, où l’on admirait Mère TERESA et le Dr. Albert SCHWEITZER (1875-1965, médecin protestant au Congo, Prix Nobel de la Paix 1952). D’autres actions et des chansons célèbres (Ethiopie sans frontières) ont conforté sa sensibilisation.
2. Les perceptions du grand public
Comme le grand public est objectivement concerné par la lutte contre la pauvreté, en tant que citoyen du monde et donateur potentiel, il est utile de connaître sa perception de la pauvreté, et ses réactions.
Une grande partie de la communication vers le grand public vise à provoquer la pitié et les émotions, et choisit dans ce but, comme symbole et affiche, un enfant démuni. Inversement, l’empathie et la mobilisation du public sont nettement moins fortes quand sont affichés des statistiques, même sous forme de messages-chocs, ou des groupes de pauvres : il semble alors que leurs ampleurs provoquent plutôt le découragement. De même, un sinistre isolé (par exemple Haïti en 2015) provoque des records de dons par rapport à la cause plus générale de la pauvreté.
De plus, la communication doit lutter contre deux idées assez largement répandues : (1) les pauvres sont paresseux ; (2) la clé de la victoire sur la pauvreté réside dans la création de micro-entreprises (souvent grâce au micro-crédit) c’est l’idée que « levons les obstacles, et les gens se débrouilleront ».
3. Les bases des actions de lutte contre la pauvreté
Esther DUFLO est quant à elle convaincue que les deux idées en question sont inexactes, et que les faiblesses à combattre, c’est-à-dire les principaux obstacles au développement, sont les mêmes que dans les pays développés, et se trouvent surtout dans l’éducation. En effet, les capacités innées des tout-petits (de 2 à 4 ans) dans les pays pauvres ne sont pas différentes de celles d’Amérique du Nord, comme le montrent des tests effectués par des psychologues de Harvard : sur des dessins de points, de lignes etc., les enfants de pays pauvres sont capables d’utiliser, sans les avoir appris et sans les formaliser, des notions mathématiques (de comparaison, de formes élémentaires dans le plan er dans l’espace etc.).
Autres découvertes :
1. Dans les écoles rudimentaires d’Afrique, d’Inde, …, les adultes savent souvent créer des programmes d’éducation primaire efficaces,
2. Les capacités innées des enfants pauvres les empêchent de percer dans l’enseignement primaire dans tous les cas où les programmes officiels, encore inspirés (par exemple au Kenya) de l’époque coloniale (peu d’élèves, et haut niveau visé) exploitent mal ces capacités. Paradoxalement, l’Inde possède à la fois un système primaire et secondaire catastrophique et des universités concurrençant les nord-américaines.
3. Autre gaspillage constaté : celui des petits vendeurs des rues. Ils sont presque tous bons en calculs intuitifs (calcul des prix et du rendu de monnaie) mais très faibles quand on leur demande de les faire par des opérations écrites.
4. Les expériences de lutte contre la pauvreté dirigée par Esther DUFLO
Des expériences éducatives, basées sur de très nombreux groupes scolaires de niveaux volontairement très différenciés, ont été menées avec l’association indienne Pratham, sous la direction d’Esther. Son équipe a évalué leurs résultats par des méthodes d’échantillonnage des villages participants, comparables à des tests cliniques. Il est apparu que les villages dépourvus de véritables programmes éducatifs produisent de faibles résultats, et qu’au contraire ceux qui s’appuient sur des programmes sérieux atteignent un fort taux de réussite. Ces expériences permettent de dégager et de sélectionner les programmes efficaces, et l’étape suivante consiste à les faire adopter par les pouvoirs publics.
Au total,
Esther a créé en Inde, en 2007, l’organisation Abdul Atif Poverty Action Lab (J-PAL), pour conduire des centaines de nouveaux projets éducatifs visant l’amélioration du sort des pauvres, aves des indicateurs de mesure de leurs résultats,
300 millions d’enfants ont déjà bénéficié de ces programmes-projets ;
Esther DUFLO conclut : le progrès est tout à fait possible en éducation, mais dans la durée et grâce à la patience, comme les progrès en médecine.
Des questions-réponses, émanant de lycéens visiblement très attentifs, ont conclu la conférence, portant sur les méthodes d’échantillonnage, l’organisation de la collecte des données des tests, les financements (notamment les fondations telles que celle de Bill GATES), les choix à faire dans la répartition des aides financières.
Nous remercions tous vivement Esther DUFLO de cette belle conférence !
Vincent BOURGERIE, Vice-président de l’Association des Anciens de Hoche.
Photo prise le 17/06/17 devant la chapelle du lycée Hoche, après la visite de cette dernière en compagnie de Vincent MULTRIER, ancien professeur d’histoire géographie à Hoche.
Photo prise le 17/06/17 dans le grand amphithéâtre du lycée Hoche, à l’issue de l’Assemblée Générale de l’Association.
Emmanuel FORT, ingénieur des Télécoms (Paris) et universitaire, physicien, Professeur de l’ESPCI Paris (Ecole Supérieure de Physique et Chimie Industrielles) à l’Institut Langevin, est venu nous présenter les recherches, qu’il dirige, sur les ondes des liquides. Cet Institut renommé a créé et soutient des entreprises pour l’application des résultats de ses travaux, avec le concours actif de la Fondation d’AXA.
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De nombreux lycéens férus de physique, des anciens professeurs, et des anciens élèves également curieux ont été plongés dans les jeux de la découverte scientifique, sous l’effet de la pédagogie d’E. FORT (relayée par des projections sur écran, sobres et illustratives) et de son enthousiasme contagieux.
1. Les antécédents: les lois des ondes lumineuses
Les recherches de l’équipe d’E. FORT s’inspirent de découvertes des XIXème et XXème siècles, y compris de la physique quantique. Le premier grand problème a consisté alors à déterminer la nature de la lumière: ondes ou particules?
Les grandes étapes ont été successivement
les fentes d’YOUNG (1 773-1 829): envoyée dans une fente microscopique, la lumière se diffracte; en passant à travers deux fentes microscopiques voisines, ses ondes interfèrent etse combinent algébriquement; tout ceci plaide pour la nature d’ondes;
les théories ultérieures de FRESNEL et MAXWELL ont formalisé cette conclusion que la lumière est un ensemble d’ondes ;
I. TAYLOR (1886-1975), à l’inverse, a réalisé des expériences sur la lumière à faible intensité et ainsi montré que celle-ci était constituée de particules(les photons) se comportant statistiquement comme des ondes ;
De façon analogue, au début du XXème siècle, plusieurs expériences ont permis de montrer le caractère ondulatoire des particules massives. L. de BROGLIE a ensuite formalisé cette dualité onde-corpuscule de l’électron et de tout objet élémentaire. Cette dualité est intuitivement incompréhensible mais incontestable.
2. Les recherches de l’Institut Langevin
2.1 Gouttes et ondes des liquides
L’équipe d’Emmanuel Fort s’est fixé l’objectif d’analyser cette dualité onde-corpuscule dans un nouveau domaine, celui des vagues à la surface de liquides vibrés, dont les rides créées par le caillou jeté sur un plan d’eau est une illustration familière. A l’aide de films en caméra rapide qui permettent de ralentir la propagation des ondes, et restituent ainsi le déroulement de leur vie de manière spectaculaire sous nos yeux, il nous a montré successivement les résultats des premiers travaux :
Lanon-coalescence de gouttes tombant sur un bain du même liquide: si normalement les gouttes se mélangent par coalescence aubain liquide, on peut les conserver séparées en induisant des vibrations sur la seringue distribuant les gouttes ou en produisant des écoulements dans le bain, par exemple en le faisant tourner sur lui-même…
En faisant vibrer verticalement le bain, on empêche également la coalescence. La goutte rebondissant alors pendant un temps infini à la surface du bain et devenant un corps qui se conserve, et même devient autopropulsée, surfant sur la vague qu’elle crée elle-même lors de ses rebonds successifs : elle devient un marcheur;
En complétant ces expériences par d’autres, on constate ici aussi la dualité onde + particule: si on enlève la goutte-particule, les ondes disparaissent, et inversement si on amortit les ondes, la goutte s’arrête. Il s’agit donc d’une entité macroscopique possédant une telle dualité.
2.2 Expériences sur ces marcheurs
L’équipe de recherche a ensuite effectué avec les marcheurs les mêmes expériences que celles de Young sur la lumière (cf. § 1 ci-dessus); les résultats sont spectaculairement voisins de ceux obtenus en mécanique quantique. En effet,
les fentes inspirées de celles de Young produisent les mêmes effets.Les paquets d’ondes associés aux marcheurs interfèrent, se combinent algébriquement eux aussi lors du passage de la goutte dans la fente;
Les gouttes sont déviées lors de leur passage par une des deux fentes. Leurs trajectoires sont distribuées de manière aléatoire mais elles suivent statistiquement une distribution de type ondulatoire comme en physique quantique.
2.3 D’autres phénomènes oscillatoires issus de la dualité onde-particule encore plus complexes
Deux autres expériences: effet «tunnel» qui montre la capacité des marcheurs à passer au-dessus de murs immergés d’épaisseur limitée (sur lesquels ils devraient être immobiles); confinement dans un puit de potentiel par aimantation de la goutte (remplie d’un fluide magnétique): les trajectoires des marcheurs prennent, dans le cas général, la forme de plats de spaghettis (plein de boucles), mais on constate qu’elles évoluent en trajectoires élémentaires particulières comme des cercles, des lemniscates et des trifoliums(en variant les paramètres de l’expérience). On retrouve aussi ici un ensemble discret de trajectoires stables se rapprochant de la quantification observable en physique quantique….
Les chercheurs ont aussi mis en évidence l’effet Narcisse (ce personnage mythologique qui adorait contempler l’image de son visage sur l’eau des flaques ou des pièces d’eau): la goutte laisse derrière elle un champ d’ondes qui interagit avec elle-même; une expérience montre en particulier qu’elle est attirée par les ondes laissées par sa trajectoire passée même quand on cesse d’appliquer au liquide des forces extérieures.
Dans tous ces phénomènes, l’instabilité de Faraday qui se produit lorsqu’un liquide est agité verticalement joue un rôle central. En se plaçant juste en dessous du seuil de déclenchement de cette instabilité, la goutte produit, lors de chacun de ses rebonds sur le bain, des ondes stationnaires qui conservent leurs oscillations quelque temps. Ce temps représente une sorte de mémoire pour le marcheur. Le paquet d’onde produit par le marcheur est ainsi constitué par l’accumulation de ces ondes élémentaires. Il encode sous forme d’onde une information sur la trajectoire au travers des chocs successifs. La dynamique du marcheur est issue de ce couplage fort entre le champ d’onde créé de façon itérative par la goutte et cette dernière qui, en retour, est pilotée par ce champ d’onde.
3. Le retournement du temps
Le miroir temporel et le retournement temporel, provoqués sur les mêmes liquides, nous interpellent encore plus, car ils soulèvent à leur manière le problème philosophique du retour, en arrière, dans le temps. Ils résultent directement des observations faites sur les marcheurs et du rôle de l’instabilité de Faraday. En effet, les paquets d’ondes entourant les gouttes sont constitués d’ondes stationnaires et contiennent donc des ondes divergentes et convergentes. Ces dernières peuvent être interprétées comme des ondes retournées temporellement et revenant sur les sources qui les ont émises. Il est ainsi possible de réaliser des expériences où, après création d’ondes, on applique au bain un choc brutal (vertical) qui a pour effet de modifier la vitesse de propagation des ondes: les ondes font alors demi-tour (sans avoir été renvoyés par les bords du bassin), c’est le retournement temporel, comme sous l’effet d’un miroir temporel. E. Fort nous l’a illustré spectaculairement par l’émission d’ondes à travers tous les trous d’une face de la micro-maquette de la Tour Eiffel, placée sous nos yeux: quand cette émission commence, on la voit se brouiller et cacher l’image de la Tour, puis quand on provoque le retour de ces émissions, l’image de la Tour réapparait.
Dans ce domaine, les résultats ont aussi permis de revisiter le « Démon» de Loschmidt (1825-91), proposition qui affirme que, dans un ensemble de particules qui bougent, l’inversion instantanée des vitesses provoque leur retour, mais n’a pas pu être vérifiée dans les particules (à cause de l’influence du bruit); en revanche, dans le domaine des ondes, cela correspond à un miroir temporel tel que découvert par l’équipe d’E. Fort.
Ce type nouveau de retournement temporel pourra peut-être un jour trouver des applications (avec des ondes non liquides)notamment en médecine où d’autres formes de retournement temporel (à l’aide de capteurs et de traitement informatique du signal) ont déjà montré leur pertinence pour détruire à distance, par focalisation d’ondes acoustiques intenses, des calculs rénaux ou des dépôts de calcaire obstruant le cœur.
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L’assistance a ainsi passé deux heures de découverte en découverte, comme si elle était immergée dans les bains de liquides ondulant et suivait les pas des « marcheurs «; après les questions-réponses, elle a chaleureusement applaudi le conférencier pour lui exprimer ses vifs remerciements. E. FORT a été nommé Membre d ‘honneur de notre association des Anciens de Hoche.
Vincent BOURGERIE, Vice-président de l’Association des Anciens de Hoche.