Conférence d’Eric TONG CUONG, au lycée Hoche le 5 octobre 2016 – Le management de la créativité

Eric Tong Cuong, ancien de Hoche (bac en 1979), créateur et dirigeant de l’agence indépendante de communication « La Chose »,  nous a fait apprécier son métier de publicitaire. Nous avons pu découvrir et partager son expérience, à travers un exposé passionnant, illustré par certains de ses films publicitaires, particulièrement créatifs.

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Son parcours

Après un an de prépa à Hoche, Eric a intégré HEC. C’est sur le campus de Jouy-en-Josas qu’il a pu profiter d’enseignements culturels, notamment sur l’art moderne. Dès lors est née chez lui l’envie de travailler dans la pub et la musique. Il est devenu assez vite Directeur Général de l’agence BDDP, est passé chez Roux Seguela, a créé le label Naïve, puis est devenu le patron de EMI Musique pour la France. En 2006, avec Stéphane Richard (son camarade de prépa et d’HEC devenu PDG d’Orange), convaincu que la révolution numérique et Internet étaient en train de transformer complètement les métiers de la publicité et de la musique, il crée son agence «  La chose ».

Créativité et stratégie de l’entreprise

En créant « La Chose », Eric souhaitait proposer un positionnement différent pour une agence de publicité. Avec Stéphane Richard et Pascal Grégoire, « La Chose » a placé le digital et la créativité au cœur de la stratégie de développement des entreprises.

Eric définit la créativité comme « tout ce qui crée de la valeur par le haut » (par opposition à celle par le bas, apportée par les réductions de coûts). Elle provoque des innovations spectaculaires et historiques, par exemple celle du projet très avancé de voiture 100 % électrique, ou encore  celle –  tout à fait éclatante – du smartphone qui ajoute un ordinateur et un appareil photo à notre téléphone mobile. Vénérée dans le monde anglo-saxon, la créativité mériterait d’être davantage mise en avant en France dans la mesure où elle joue un rôle stratégique dans la survie et le développement des entreprises. Elle permet de donner aux nouvelles générations de la satisfaction personnelle et du sens à leur travail.

Les 30 années d’expériences d’Éric Tong Cuong dans la publicité lui ont permis de distinguer trois catégories de stratégies :

  • Le Leader, « j’y suis, j’y reste », qui défend sa propre position. Le leader est plus occupé à défendre sa place plutôt qu’à produire de l’innovation.
  • Le Challenger, « ôte toi de là, que je m’y mette», qui cherche à prendre la place du leader. On peut alors penser à Pepsi qui a cherché à dépasser Coca-Cola.
  • La Disruption ou « la vérité est ailleurs ». Dans les années 90, on cherche à bouleverser les marchés et les habitudes. On se met à penser que la vérité est ailleurs et donc que le concurrent n’est pas celui qui nous ressemble. Il s’agit d’une stratégie de redéfinition et de réinvention du système.

Concrètement, la créativité en communication élabore et met au point des idées tout à fait nouvelles, puis  les réalise sous forme audio-visuelle. La créativité est donc l’idée mais aussi sa production. Par exemple, pour faire la publicité de l’Artisanat en France (vidéo récente signée par « La Chose »), les créatifs n’ont pas joué sur son image traditionnellement défensive (qualité et personnalisation du travail, expérience, …) mais sur une idée de communication tout à fait nouvelle : l’artisanat est présent partout en France et crée beaucoup d’emplois.

Comment manager la créativité

L’art de manager la créativité obéit à plusieurs caractéristiques fondamentales, que l’expérience d’Éric nous a permis de comprendre et de mesurer, à travers leurs dimensions théoriques et pratiques :

« La créativité, c’est l’idée et la réalisation de l’idée ».

La créativité n’aime pas les pré-tests tels que les sondages ou les précédents : elle les bouscule et les renverse. La créativité décoiffe ! Elle doit remettre en cause le système habituel pour bouleverser le quotidien et le modifier. Dans le cadre de la campagne qu’elle a réalisée pour Virgin Megastore, « La Chose » a utilisé des concepts visuels et des techniques de réalisation des années 30 pour surprendre le public : https://goo.gl/z4bDgU.

« La créativité, c’est la contrainte ».

La créativité consiste avant tout à savoir se brider pour faire émerger un réel talent. Par exemple, en musique chez EMI, Éric a vu des contraintes d’instruments ou de techniques apporter des (petites) révolutions. La créativité doit également savoir dépasser la contrainte. Elle est donc un équilibre entre une idée et des contraintes.

« On ne traite pas les pur-sangs (les créatifs) comme des poneys (les exécutants) ».

Il est essentiel, pour réussir les pubs, de bien identifier et utiliser tous les talents auxquels l’agence peut avoir accès, en tenant compte des contraintes budgétaires.

« La production, c’est là que tout se passe ».

La réalisation de la créativité est aussi importante que l’idée elle-même. La créativité est un collectif, un flux continu qui doit passer par la production pour en décoder les dynamiques. Les images, les vidéos, les sons ou les jingles font en sorte que l’idée se transforme en message visible ou invisible, lui conférant dès lors force et puissance.

Eric Tong Cuong a illustré ses propos à travers la projection de vidéos publicitaires qu’il a pu réaliser au cours de sa carrière :

  • Les beaux bébés nageurs qui plongent, se régalent et jouent un ballet aquatique bien réglé dans l’eau d’Evian, prônant la jeunesse du corps grâce à celle-ci : https://goo.gl/L3zntn.
  • L’Artisanat, omni présent géographiquement et 1er employeur en France : https://goo.gl/Z0eDZb.
  • Air France, dont l’attrait vient moins de ses avions ou de son service à bord, que des charmes de la France qu’ils survolent, avec un rythme de vidéo inhabituellement lent : https://goo.gl/oYI8qN.
  • La Sécurité routière : alors que les accidents de la route font encore 3 500 morts par an, « La Chose » a décidé de déplacer l’impact du message de prévention sur les victimes collatérales des accidents : parents qui ne s’en remettront jamais, douleur psychologique des proches, bouleversement du futur professionnel des enfants, … : https://goo.gl/5gkjzC.

Après cet exposé particulièrement applaudi, Eric Tong Cuong a accepté de se livrer à un jeu de questions-réponses sans langue de bois avec les élèves, les professeurs et les anciens élèves présents dans la salle.

 

Vincent BOURGERIE, Vice-président de l’Association des Anciens de Hoche.

Conférence du Vice-Amiral d’escadre (2s) Hervé GIRAUD, au lycée Hoche le 22 mars 2016 – le Général Henri GIRAUD : le libérateur oublié

 

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Le Vice-Amiral d’Escadre (2ème section) Hervé GIRAUD (Hoche 1964) est venu nous parler du Général d’Armée Henri GIRAUD (1879–1949), son grand père. Il avait déjà honoré le lycée Hoche par sa présence et par une allocution remarquée, lors de la cérémonie du Souvenir, le 10 novembre 2015.

Le 22 mars 2016, il nous a vivement intéressés une nouvelle fois, en évoquant la vie et l’œuvre du Général GIRAUD, dans son contexte historique, bouleversé et douloureux, qu’il connaît parfaitement, par sa famille et par sa carrière militaire ; il a accompagné son exposé, très précis et documenté, d’enthousiasme et de brio. Comme il est impossible de le restituer en entier, nous avons retenu es grands moments de cette vie, et le plaidoyer contre l’oubli de son action et l’ingratitude à son égard. Il est en effet, comme le rappelle Hervé, un grand libérateur oublié.

1. Un officier prometteur
Le Général GIRAUD fait partie (avec les futurs généraux de Gaulle, de Lattre, Juin) de cette génération d’officiers qui ont marqué l’histoire de notre pays et ont grandi, à la fin du XIXème siècle, dans le mouvement d’espérance nationale du retour de l’Alsace-Lorraine arrachée par à la France après la défaite de 1870. Esprit de revanche entretenu dans l’opinion grâce à l’action d’écrivains tels que Maurice Barrès et d’hommes politiques tels que Georges Clémenceau.

En 1914-1915, Giraud est capitaine. Blessé d’une balle au poumon à la bataille de Guise le 30 août 1914, laissé pour mort sur le champ de bataille, puis ramassé par des brancardiers allemands et fait prisonnier, il s’évade deux mois plus tard et regagne le front jusqu’à la victoire. Le 23 octobre 1917, il reprend avec son bataillon le fort de La Malmaison tenu par la Garde impériale ; cet exploit connaît un très grand retentissement. Nommé commandant, il participe ensuite à toutes les offensives de 1918 au sein de la fameuse division marocaine, et termine la guerre avec cinq citations dont quatre à l’ordre de l’Armée.

2. Entre les deux guerres : l’Afrique du Nord, et la menace allemande.
Après deux années de repos forcé dû à ses blessures de 1914-18, il est rappelé au service lors du déclenchement, au Maroc, de la guerre du Rif où ses qualités de tacticien et de chef lui valent les éloges de Lyautey. Blessé, il se distingue par la capture du chef rifain, Abd-el-Krim (1925). Un fait d’armes célébré par tous les grands journaux et applaudi par l’opinion publique.

Affecté ensuite à l’Ecole de guerre (1927) comme professeur d’infanterie, il enseigne et participe à la réflexion stratégique, soulignant avec clairvoyance le rôle croissant des chars et de l’aviation.

En 1930, nommé général, il parachève la pacification du Maroc. Après avoir commandé la division d’Oran, il est nommé début 1936 gouverneur militaire de Metz, qui est alors la capitale militaire de la France face à l’Allemagne. Convaincu des intentions belliqueuses du nouveau régime allemand, il pousse sa hiérarchie à se montrer ferme face à Hitler en ripostant, en1936, à la réoccupation de la Rhénanie par l’Allemagne et, en 1938, peu avant les accords de Munich, en recommandant à l’Etat-major d’occuper préventivement la Sarre pour donner l’avantage à la France lors du prochain conflit. Hélas ! Il n’est pas écouté.

3. Les grandes épreuves et les grandes réussites : 1940-1949
Promu général d’Armée, Giraud réalise en mai 1940 la manœuvre Bréda (une des rares grandes offensives françaises de la guerre de 1940), à la tête de la VIIe Armée, à laquelle le général Gamelin l’arrache le 15 mai pour le nommer en catastrophe à la tête de la IXème Armée alors en pleine débâcle devant la ruée des panzers à travers les Ardennes. Mais le 19 mai 1940, Giraud, toujours en première ligne, tombe aux mains du Panzer Gruppe du général Von Kleist et il est transféré dans la forteresse de Königstein (Saxe). Il refuse de prêter serment de ne pas s’évader, et écrit en septembre sa fameuse « Lettre à ses enfants » qui commence par ces mots : « Je vous interdis de vous résigner à la défaite… » et qui va connaître un grand retentissement au sein de l’armée d’armistice en France occupée.

Deux ans plus tard, le 17 avril 1942, à 63 ans et malgré les séquelles de nombreuses blessures, Giraud s’évade en descendant un a pic de plus de 40 mètres avec une corde qu’il a tissée lui-même puis, après un périple mouvementé de 800 kilomètres à l’intérieur du Reich, poursuivi par la Gestapo, mais grâce au concours des résistants alsaciens et lorrains dont plusieurs le paieront de leur vie, il parvient à regagner la zone libre par l’Alsace et la Suisse. Cette « évasion retentissante » est le premier camouflet à Hitler sur le territoire même du Reich. Lors d’un discours aux Communes, Churchill lui rend cet hommage : « Giraud, l’homme qu’aucune prison ne peut retenir. » Refusant de se constituer prisonnier comme le lui demande Vichy, Giraud, prend contact avec les Américains (accords GIRAUD/MURPHY du 2 novembre 1942 qui préservent la souveraineté française) et organise l’ORA (l’Organisation de résistance de l’Armée).

Le 6 novembre 1942, Giraud s’évade de France à partir d’une plage du Lavandou en direction de l’Afrique du Nord où, retardé par le mauvais temps, il n’arrive que le 9 novembre alors que le débarquement allié a commencé la veille.

Les Américains décidant- en son absence – de jouer la carte Darlan, il se rallie à contre cœur à cette formule pour cause d’urgence stratégique et, le 19 novembre, il relève l’ultimatum de Von Rundstedt : la bataille de Tunisie commence. Mal armés, mal équipés, 80000 soldats français font preuve d’un héroïsme quotidien durant cinq mois. Le bilan est terrible : 10 000 tués et disparus.

Le 28 novembre 1942, il est déchu par Vichy de la nationalité française. Ses biens sont confisqués et sa famille est déportée en Allemagne.

Fin décembre 1942, après l’assassinat de l’amiral Darlan, il devient commandant en chef civil et militaire de l’Afrique du Nord. Et en janvier 1943 lors de la conférence d’Anfa, il obtient de Roosevelt le réarmement de l’armée française qui va lui permettre de tenir sa place dans la bataille d’Europe. « C’est à Giraud et à lui seul que l’on doit le réarmement de l’armée française », écrit le Pr. Philippe Masson. La célèbre photo de sa poignée de main avec de Gaulle, en présence de Roosevelt et Churchill, fait le tour du monde.

Le 20 mai 1943, dans Tunis libéré, Giraud et Eisenhower président côte à côte le défilé de la victoire. Roosevelt écrit à Giraud : « J’exprime l’admiration du peuple de l’Amérique en saluant la brillante contribution des forces françaises sous votre commandement, qui vient d’aboutir, hier, à la délivrance de Tunis et de Bizerte. ».Giraud invite de Gaulle à le rejoindre à Alger et, le 3 juin 1943, les deux généraux créent ensemble le CFLN (Comité Français de la Libération Nationale) qu’ils co-président.

Sans l’aide des Alliés qui trouvent l’affaire trop risquée, et contre l’avis du Général de Gaulle et de certains membres du CFLN qui prédisent un «bain de sang», Giraud libère la Corse en trois semaines avec l’appui de la Résistance corse. Le 4 octobre, de Gaulle le félicite au nom du gouvernement de « l’heureuse issue » de l’opération militaire. « Il l’avait prescrite et lancée. Il en avait assumé le risque. Le mérite lui en revenait », écrira-t-il dans ses Mémoires.

La politique reprenant ses droits, Giraud se voit retirer ses attributions de co-président en novembre 43, mais devient Commandant en chef de l’armée française réunifiée (Armée d’Afrique et FFL), et lance le corps expéditionnaire français commandé par Juin dans la campagne d’Italie.

Partisan de l’offensive danubienne à partir de l’Italie reconquise, Giraud est placé, le 14 avril 1944, pour cause de différent géostratégique avec le Général de Gaulle, en réserve de commandement. Le Général de Gaulle décide donc de supprimer le poste de Commandant en chef des Armées françaises occupé par Giraud.

Le 15 avril 1944, au cours d’une conférence de presse, à Alger, le général de Gaulle lui rend néanmoins cet hommage : “Je dis bien haut que la magnifique carrière militaire du général Giraud fait extrêmement honneur à l’Armée française. Je dis bien haut que son évasion légendaire de la forteresse allemande de Königstein, sa volonté immuable de combattre l’ennemi, sa participation éminente à la bataille de Tunisie et à la libération de la Corse, lui assurent, dans cette guerre même, une gloire qui ne sera pas oubliée !”

Relégué à Mazagran, Giraud y est victime d’un attentat le 28 août 1944, mais il s’en sort miraculeusement. Rentré en France fin 1944, il tente de retrouver sa famille déportée à Friedrichroda (Thuringe) où est morte sa fille ainée, Renée.

Après la guerre, il écrit deux livres : Mes Evasions (1946) ; Un seul but, la Victoire (1949)

Après avoir reçu sur son lit d’hôpital la Médaille militaire, distinction suprême pour un général ayant commandé en chef devant l’ennemi, il décède à Dijon, le 11 mars 1949, Le général de Gaulle vient se recueillir devant sa dépouille et lors de ses obsèques nationales, Paul Ramadier, président du Conseil, et Max Lejeune, ministre de la Défense, prononcent son éloge funèbre. Son corps, exposé sous l’Arc de triomphe, est ensuite conduit dans la crypte des Invalides, parmi ses pairs.

Sa quatorzième et dernière citation dit ceci : « Chef prestigieux, aux états de service splendides, s’est évadé en avril 1942 de la citadelle de Königstein, exploit tenant de la légende, avec la volonté ardente de reprendre le combat. Présent à Alger à l’heure décisive, a pris une part déterminante à la rentrée en guerre de l’Afrique du Nord dans la guerre. A réussi dans les moindres délais à jeter les troupes françaises, face à l’avance allemande, en couverture des débarquements alliés, préparant, par les succès de Medjez-el-Bab, de Pichon, de Fahd et de Kasserine, la libération de la Tunisie. Quelques mois plus tard, en une action d’une audace extrême, avec des moyens réduits uniquement français, s’appuyant sur les combattants du maquis, a libéré la Corse, premier département métropolitain repris à l’ennemi. Enfin, de 1942 à 1944, a hautement contribué à organiser l’Armée française de la Libération qui devait s’illustrer dans les campagnes d’Italie, de France et d’Allemagne. Soldat magnifique, d’un courage jamais abattu, d’une dignité égale à son abnégation, compte parmi les gloires les plus pures de l’Armée française. »

On peut retenir du Général GIRAUD, une grande œuvre, un grand chef militaire, un vrai patriote parfaitement désintéressé qui ne mérite certainement pas l’indifférence – quand ce n’est pas l’ingratitude – qui entoure encore trop souvent son souvenir (par exemple, son nom est trop peu donné à des lieux publics en France). Il est bien le grand libérateur oublié.

Merci beaucoup à Hervé GIRAUD d’avoir évoqué cette grande figure auprès des nombreux élèves et anciens élèves de Hoche, visiblement enchantés par sa conférence, de l’avoir fait revivre devant nous avec talent.

 

Vincent BOURGERIE, Vice-président de l’Association des Anciens de Hoche.

 

 

Conférence de Michel ZINK à Hoche le 2 décembre 2015 – Bienvenue au Moyen Âge : s’évader et se retrouver.

conférence de Michel Zink : BIENVENUE AU MOYEN-ÂGE : S’ÉVADER ET SE RETROUVER

Michel ZINK, ancien du Lycée du Parc à Lyon et père de trois anciens de Hoche, passé par l’ENS Lettres, est Professeur au Collège de France, Membre de l’Institut et Secrétaire Perpétuel de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres.
Philologue de la littérature médiévale, qui est riche en légendes, récits, poèmes, il lui a consacré la plus grande partie de sa vie professionnelle, et en a tiré pour le grand public des chroniques régulières sur France Inter, résumées en librairie sous le titre « Bienvenue au Moyen Âge «. Le 2 décembre 2015, il nous a entretenus, de manière détendue, amusée et brillante, du Moyen Âge, en particulier de la poésie crée et diffusée par les troubadours.

L’assistance réunissait des dizaines d’anciens professeurs, d’anciens élèves, de parents d’anciens et d’élèves du Lycée ; nous avons tous été entraînés par Michel ZINK, et comme le titre de la conférence nous y invitait, nous nous sommes ainsi évadés de nos soucis courants et avons retrouvé des racines anciennes.
On identifie spontanément le Moyen Âge plutôt à des siècles de malheurs, d’atrocités et d’obscurantisme, mais au fond nous sommes aussi sensibles à sa spiritualité et sa poésie ; nous lui devons beaucoup de légendes et de poèmes, et il a exprimé et inspiré largement nos sentiments d’amour. Revisitons le donc ! Certes tout un travail d’érudition est nécessaire pour comprendre et apprécier ces textes, mais on est récompensé en retour par la découverte de leur sens et de leur valeur : c’est l’expérience que M. ZINK a vécue dans son métier de philologue et nous a communiquée.

1. Définition et caractéristiques du Moyen Âge littéraire

Le terme de Moyen Âge, c’est-à-dire « âge moyen«, créé au XVIème siècle, et le caractère temporel de sa définition – de la chute de l’Empire romain d’Occident à la renaissance des lettres – sont peu satisfaisants pour l’esprit. En effet, la fin du Moyen Âge aurait été mieux définie par un événement précis (la découverte de l’Amérique, 1492), et cette renaissance des lettres a trop varié d’un pays à l’autre, avec plus d’un siècle d’écart entre la France et l’Italie, pour constituer une date précise.

Cependant, une caractéristique/majeure du Moyen Âge est l’apparition rapide de nos langues romanes (français, italien, langue d’oc) et l’essor corrélatif de notre littérature nationale, dans le contexte de perte d’audience et de morcellement du latin (qui jusque-là constituait la langue officielle et uniforme). Les clercs, jusque-là détenteurs presque uniques des savoirs, ont accompagné et vite soutenu officiellement (au Concile de Tours en 813) la montée de ces langues populaires. Ces textes postérieurs au latin (qui servait de langue unique) ont été tout d’abord religieux, puis littéraires, dès le XIème siècle ; leur forme a privilégié la prose puis les poèmes. La floraison des meilleurs de ces textes, religieux et profanes, est passée à la postérité car elle exprime des sentiments profondément humains et éternels. Parmi eux, le thème de l’amour est dominant.

2. Le thème de l’amour au Moyen-âge

C’est au Moyen Âge que l’amour est devenu la grande affaire de la poésie ; jusque-là, sous l’influence de la poésie antique, les grands thèmes étaient la guerre et les aventures, inspirés notamment par l’Iliade et l’Odyssée. Alors que le Moyen-âge souhaitait prolonger le monde romain, il a choisi cette rupture de thèmes, sous l’effet des deux causes suivantes :

  • la forte influence de la christianisation : alors même que la poésie semble initialement s’opposer aux règles de l’Eglise (poète signifiant initialement païen), le Christ, Dieu incarné, crée et apporte à l’humanité la religion de l’amour;
  • l’amour et l’angoisse ont été alors perçus comme les sentiments fondamentaux, et ont surgi au premier rang des sources d’inspiration des poètes.

Ce sont d’abord les troubadours des XIème et XIIème siècles qui ont développé cette poésie de l’amour, l’ont propagée de château en château, et entretenue par des émulations organisées entre eux ; son thème essentiel est que l’amour constitue un désir à la fois exaltant et douloureux, et que son assouvissement se produit dans la mort. Cette contradiction et cette tristesse intrinsèques à l’amour ont entrainé, sur le plan de la forme, un langage aux sons rugueux, presque douloureux, traduisant la tension interne et le malheur ; pour bien exprimer l’amour, le style du texte devait donc être torturé, destructeur et hermétique, aux antipodes des recommandations (ultérieures) de Malherbe.
Beaucoup de ces poèmes commencent par l’évocation de la Nature, de manière très différente de la nôtre, post romantique : le troubadour ne s’intéresse pas au paysage, mais se concentre sur un contact primaire avec une saison, une fleur, ou un cours d’eau, et y retrouve des impressions intimes, souvent celle de la fragilité de l’amour.

3. Les évolutions des poésies

Le long travail du philologue du Moyen Âge met en évidence une longue évolution de l’ensemble de ces poésies, du XIème au XIVème siècle, illustrée par les œuvres de Guillaume de Ventadour à Dante.

Au XIIème siècle, marqué par l’influence austère assez lourde des cisterciens, Guillaume de Ventadour célèbre la nature hivernale rugueuse, et son angoisse éclate quand il évoque l’Amour-Eros, en transgressant de fait les formes littéraires autorisées.

Ensuite, le savoir et l’expression s’organisent progressivement et la poésie s’intellectualise, et aboutissent au Roman de la Rose, chef d’œuvre du XIIIème, allégorique et didactique, qui célèbre avec élégance la nature, en particulier les roses, et l’art d’aimer (20 000 vers).

Enfin, le cheminement culmine dans les œuvres de l’immortel Dante, auteur des célèbres sonnets inspirées par sa passion pour Béatrice, de la Vita Nuova et de la Divine comédie. Il célèbre, au début de ces œuvres, la découverte de l’amour jeune, puis évolue vers celle de la passion amoureuse, s’élève ensuite à la réflexion philosophique, et enfin arrive au plus haut degré d’épuration et au divin.

En ces jours de décembre, les moins lumineux de l’année, nous avons pu revivre, grâce au contenu de cette conférence, les sentiments d’un autre grand auteur du Moyen Âge, le poète Charles d’Orléans (1394 – 1465) : d’abord sa tristesse
Yver, vous n’estes qu’un vilain.
puissa certitude du retour du printemps et de ses joies :

Les fourriers d’Eté sont venus
……………………………….
Pour appareiller son logis,
Allez-vous en, prenez pays,
Et ont fait tendre ses tapis
Hiver vous ne demeurez plus
De fleurs et verdure tissus.
Les fourriers d’Eté sont venus !

 
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Merci au Professeur ZINK de nous avoir conduit dans l’évasion, hors de nos soucis courants, et de nous avoir fait retrouver les beautés éternelles des poésies médiévales !

Vincent BOURGERIE, Vice-président de l’Association des Anciens de Hoche

Les anciens élèves du lycée participent à la Cérémonie du 11 novembre et sont honorés de la présence du Vice-amiral d’escadre (2s) Hervé GIRAUD (élève à Hoche entre 1960 et 1963)

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Intervention de Thomas LEGRAIN Président de l’association des Anciens de Hoche :

Merci, Monsieur le Proviseur, de permettre au lycée de renouer avec cette cérémonie du souvenir auxquels tant d’anciens élèves demeurent viscéralement attachés.

Bravo aux élèves pour leur exceptionnelle implication dans l’organisation de cette cérémonie.

Merci aussi à toi, Amiral Hervé Giraud, d’être aujourd’hui la voix des anciens. A ta remarquable carrière au service du pays, durant laquelle tu as exercé des commandements, occupé des postes stratégiques, traité de relations internationales au plus haut niveau, tu ajoutes une légitimité familiale que beaucoup ici connaissent : le général Henri GIRAUD, ton grand-père, a laissé son nom à l’histoire de France en incarnant l’armée, la nation et la résistance dans ce qu’elles avaient de plus noble. En ce jour où le mot « patrie » retrouve un sens trop souvent oublié, nul mieux que tu ne pouvait l’incarner.

Déroulé de la cérémonie :

10H 15 Rassemblement dans la cour d’honneur Délégués de classe, élus du CVL, membres du conseil d’administration, classes désignées, membres du personnel,
Autorités civiles et militaires,
Porte-drapeaux
10 h 30 Début de la cérémonie Ouverture par le proviseur
10 h 35 Interventions des élèves CVL, élèves de Madame Moynot et Madame Chabert
10 h 45 Intervention d’un ancien élève Amiral Hervé GIRAUD
10 h 55 Déplacement de la délégation dans la cour devant les plaques Elèves élus au CA du lycée et du collège, Proviseur, autorités présentes, Porte-drapeaux
11 h Dépôt de gerbes
(6 à 8 élèves)
Préfet, maire, proviseur, anciens élèves
11 h 05 Appel aux morts de 1915 Elève du CVL
11 h 10 Sonnerie aux morts
Minute de silence
clairon
11 h 15 Marseillaise Chantée par les élèves, dans la cour d’honneur Monsieur Kerhervé
11 h 30 Présentation des travaux des élèves SALLE DES ACTES
11 h 30 rafraîchissements SALLE DES ACTES
A partir de
11 h 30
visite de l’exposition
1914-1918 élèves et blessés réunis
MUSEE

Intervention du Vice-amiral (2s) d’ascadre Hervé GIRAUD

Chers élèves, chers amis

Au lendemain du conflit dont nous célébrons aujourd’hui les héros, la France comptait ses morts :
1 400 000 tués et des centaines de milliers de mutilés sur 8 millions de mobilisés !

Les chiffres sont hallucinants :
1 officier d’Infanterie sur 3 tué, 1 homme de troupe sur 4.
Une moyenne de 890 tués, chaque jour de ces quatre années et demi de guerre
Les 389 noms qui figurent sur les plaques devant lesquelles nous nous recueillerons dans quelques instants, représentent donc les pertes de moins d’une demi-journée de guerre !

Tant de Forces vives, d’intelligences, de volontés, de savoirs – qui avaient mis tant d’années à être crées – disparus, envolés en quelques heures !
Comment s’étonner du déclin qui allait frapper notre Pays après cette tragédie sans précédent dans notre histoire.

Sans compter le chagrin et le désespoir s’abattant sur tant de familles françaises dont peu sortaient épargnées de ce conflit meurtrier!

Les grands chefs comme les autres : Le Général FRANCHET d’ESPEREY avait perdu son frère et son fils, le Général CASTELNAU trois de ses fils, le Maréchal FOCH, son fils unique.

Le futur Président DOUMER avait quant à lui perdu ses quatre fils et son gendre !
Le grand historien Jean Baptiste DUROSELLE se demandait comment les soldats français avaient pu tenir aussi longtemps dans cet enfer.

On peut en effet légitimement s’interroger.

J’y vois pour ma part deux raisons principales :
L’amour de la patrie qui animait chacun de ces enfants de France et la confiance qu’ils éprouvaient à l’égard des chefs qui le commandaient :

Deux notions qui aujourd’hui semblent bien appartenir à un passé révolu !

Toutes ces femmes, Tous ces hommes faisaient partie de ce que l’on appelle la « génération de la revanche ».
Ils étaient nés dans une France meurtrie par la perte de l’Alsace et de la Lorraine, que chacun aspirait à recouvrer.
C’était donc une France qui ne s’avouait pas vaincue.

Jamais même notre pays n’avait vibré d’une telle ferveur patriotique.
C’est sans doute la première fois dans notre histoire que des mères avaient délibérément, élevé leur fils dans la perspective de la guerre.

Car, en ce temps-là, l’amour de la patrie commandait tout.
Cet amour-là, écrivait le Général Henri Giraud – mon grand-père – au soir de sa vie, je l’ai sucé avec le lait de ma mère, je l’ai appris sur les genoux de mon père, je l’ai raisonné par l’étude de l’Histoire, je l’ai fortifié par la vie intense que j’ai menée.”

“Dès mon plus jeune âge, j’ai voulu être soldat pour imiter ceux dont j’avais lu les aventures, qu’ils soient les soldats du Roi, de la République ou de l’Empire (…)
GIRAUD faisait ainsi écho à l’historien Marc Bloch qui disait :
« Il est deux catégories de français qui ne comprendront jamais l’Histoire de France : ceux qui refusent de vibrer au souvenir du sacre de Reims; ceux qui lisent sans émotion le récit de la fête de la Fédération.”
Qu’il me soit permis d’évoquer – en cette journée du souvenir – quelques faits d’armes de ce soldat d’exception qui a participé à tous les combats de la première moitié du 20 ème siècle, car ce sont ces faits d’armes et cet exemple qui, alors que j’étais sur les bancs du lycée HOCHE il y a 50 ans , constituaient ma motivation la plus profonde et ont fait de moi ce que je suis devenu.
GIRAUD faisait partie de cette cohorte d’officiers hors pair qui avaient nom , DE LATTRE , JUIN ,DE GAULLE et qui avaient été élevés délibérément par toutes les institutions – Famille , Ecole , Eglises , Partis – pour venger la défaite .
Je comprends qu’il puisse être difficile aujourd’hui –pour les élèves que vous êtes- confrontés à des défis si différents, dans un monde qui a subi tant de bouleversements, de comprendre l’état d’esprit qui animait ces jeunes hommes et femmes, mais c’est bien de notre Histoire commune qu’il s’agit et il est toujours bon de savoir d’où l’on vient.

Un bref retour vers le passé donc.

Nous sommes le 30 aout 1914 .La guerre a commencé il y a quelques semaines à peine. GIRAUD, alors capitaine charge une batterie allemande à la tête de sa compagnie sur le plateau de GUISE .Il tombe foudroyé une balle lui ayant traversé la poitrine. Laissé pour mort sur le champ de bataille il est ramassé le lendemain matin par les brancardiers allemands et fait prisonnier.

Son état ne fait guère de doute pour le médecin allemand qui se contente de demander sa religion, et de faire un signe à l’aumônier. Ce n’est que plus tard, en constatant qu’il est toujours vivant, qu’il décide de l’opérer.

– Vous avez de la chance que vos hommes ne vous aient pas emporté dans leur retraite, Monsieur, vous seriez mort maintenant, lui dit-il à son réveil.
C’est en effet le caillot qui s’est formé au cours de la nuit qu’il a passée sur le champ de bataille, qui a sauvé la vie du capitaine GIRAUD.

Un mois et demi plus tard, sa blessure encore largement ouverte, un drain dans le poumon, GIRAUD s’évade au cours d’une odyssée incroyable qui le verra passer par la Belgique, la Hollande, la Grande Bretagne et enfin la France ou il arrive au printemps 1915.

La mère d’un de ses soldats lui écrit alors :
« Monsieur, j’ai appris par des amis votre évasion.
Vous êtes le capitaine d’un fils très cher GEORGES, tué le 17 décembre dernier. Il était caporal dans votre compagnie et si heureux de partir avec vous qu’il considérait comme un dieu.
Notre premier mot en vous sachant libre a été à tous :
« Si Georges était là, s’il pouvait le savoir ! »
Eh bien, moi, sa mère, je viens le remplacer, mon gars tué loin de vous qu’il aimait, et vous dire de sa part l’admiration, la joie profonde que votre évasion nous fait éprouver.
Quoiqu’il vous arrive par la suite, sachez que vous avez été l’idole d’un enfant mort seul, ou presque, parce que nos ennemis l’ont séparé de vous, et que l’amour de cet enfant vous portera bonheur car il vous a béni.
Pardonnez cette longue lettre, n’y voyez que l’hommage d’outre tombe d’un soldat qui vous adorait et croyez aux sentiments d’admiration de sa mère. »

La formulation peut paraitre aujourd’hui un peu naïve, mais c’est le témoignage d’une mère qui a perdu son fils et à ce titre, elle mérite le respect .Elle reflète bien ce patriotisme ainsi que cette confiance dans la personne du Chef que j’évoquais au début de mon propos.

Dès son retour en France, GIRAUD reprend sa place au combat et C’est lui qui, le 23 octobre 1917, à la tête de son bataillon, s’empare du Fort de la Malmaison tenu par la Garde impériale du KAISER. Les mitrailleurs allemands s’étaient enchainés à leurs armes pour s’empêcher de reculer.

Car des deux cotés du Rhin, la Patrie était une religion !

Il y a quelques années, vivait encore un des soldats qui avait conquis avec le commandant Giraud le fort de la Malmaison. Il s’appelait Joseph PAULI. Il avait 1O4 ans. Je suis allé le voir. Il m’a raconté la guerre, Les explosions, les gaz, la boue, les cris des blessés tombés entre les lignes ennemies et en proie, la nuit, aux attaques des corbeaux. Bref, l’enfer sur terre. Puis le très vieux soldat m’a dit en me pressant très fort les mains et les yeux embués de larmes :

Pour nous, GIRAUD, c’était un dieu!”.

GIRAUD termine la guerre avec cinq citations. Mais son corps a souffert et il va être mis pendant deux ans en position de « non activité » et va même songer à quitter l’Armée tant sa blessure au poumon le fait souffrir.

Les autres ne sont pas mieux lotis : le futur Maréchal JUIN a perdu son bras droit ! DE LATTRE a été blessé 4 fois et gazé deux fois ! Lui aussi, devra faire un long séjour au Mont Dore pour se refaire une santé.

Des 4 que je citais précédemment, seul DE GAULLE sort physiquement indemne,
Mais il est moralement très déprimé d’avoir passé deux ans en captivité et n’avoir pas participé aux combats décisifs et donc à la victoire.

Ces quelques exemples illustrent bien la foi dans leur pays qui animait ces hommes et ces femmes.

Je souhaiterais pour terminer, montrer par deux derniers témoignages, comment la détermination, le courage et l’Aura d’un chef peuvent –dans des moments de grande détresse personnelle ou de désespoir d’un peuple entier – influer sur le cours des évènements.

Au Maroc, entre les deux guerres, où LYAUTEY l’a appelé à ses cotés pour conduire la Guerre du RIF, GIRAUD a sous ses ordres BOURNAZEL

BOURNAZEL, c’est l’homme à la veste rouge, un Héros qui a fait rêver toute une génération d’officiers, celle de vos de vos grands et arrière grands-parents.

Car l’homme était entouré d’une légende : Il portait toujours au combat une veste rouge qui aurait du le rendre particulièrement vulnérable aux coups de ses adversaires, mais c’est tout le contraire qui se produisait car ses ennemis pensaient que cette veste rouge le rendait invincible, que les balles ricochaient dessus et se retournaient contre ceux qui avait tiré.

Et bien cet homme, un soir, assiégé par ses ennemis, après des aventures sans nom où il a vécu jusqu’aux extrémités de la peur, ce brave parmi les braves, a connu sa nuit de Gethsémani qu’il a racontée ainsi :
“J’ai fait le tour de ma pauvre défense. J’ai causé avec les hommes et j’ai constaté qu’il en manquait encore une vingtaine environ.
Je me suis assis, j’ai mis ma tête dans mes mains et je me suis mis à pleurer doucement. J’ai pleuré de détresse morale, je le confesse aujourd’hui, j’ai pleuré de souffrance physique.
J’ai pleuré en me suppliant d’arrêter mes larmes et je n’ai pu retrouver mon calme qu’au moment ou dirigeant ma pensée vers Dar Caïd Medboh, la silhouette du colonel GIRAUD m’est apparue.
Dans mon désarroi, je voyais ce magnifique soldat toujours confiant malgré les épreuves nombreuses auxquelles il était soumis. Alors je me suis raccroché à cette évocation et j’ai séché mes yeux, honteusement.”

Dernier exemple enfin lorsque WINSTON CHURCHILL premier ministre du gouvernement britannique apprends le 17 Avril 1942 , au cours du deuxième conflit mondial et alors que les armées allemandes volent de succès en succès l’évasion du général d’Armée Henri GIRAUD de la forteresse de Königstein, ou il était retenu prisonnier en plein cœur de l’Allemagne- forteresse dont personne ne s’était à ce jour évadé – en se laissant glisser le long d’un à-pic de 45 mètres à l’aide d’un câble qu’il avait confectionné lui-même pendant ses deux ans de captivité,

Il déclame dans un discours fameux devant le parlement de Westminster :
“Tant qu’il y aura des Hommes comme le Général GIRAUD, ce vaillant guerrier que nulle prison ne peut retenir, ma confiance dans l’avenir de la France demeure inébranlable”.

Je vous incite donc Mesdames , Messieurs , chers élèves – en cette journée du souvenir – à méditer ces exemples car même s’ils se réfèrent à une période de notre histoire, qui pour vous qui êtes naturellement et heureusement tournés vers l’avenir, fait partie d’un passé très ancien, ils témoignent de vertus intemporelles.

Qui sait si vous, élèves du Lycée HOCHE – et je pourrai adresser le même message à des élèves de lycées Allemands de BERLIN, DUSSELDORF ou COLOGNE – car heureusement désormais, et espérons le pour toujours, la France et L’Allemagne sont de fidèles et loyaux partenaires , qui sait donc si vous n’aurez pas un jour à puiser au tréfonds de vous-même pour faire prévaloir les valeurs qui ont fondé nos pays et notre civilisation , contre une barbarie dont chaque jour qui passe nous montre les contours effrayants.

Je suggère donc à chacun d’entre vous, dans l’enceinte de ce beau lycée de Versailles- ville rendue célèbre par le plus grand de nos Rois- à vous inspirer de la devise du maréchal de Fabert qui servait ce grand Roi et qui disait :

« Si pour empêcher qu’une place que le Roi m’a confiée ne tombe aux mains de l’ennemi, il me fallait mettre sur la brèche ma personne, ma famille et mon bien, je n’hésiterais pas un seul instant à le faire »

Je vous remercie.

A propos de l’amiral GIRAUD :

Entré à l’école navale en 1966, le VICE AMIRAL D’ESCADRE GIRAUD a servi la marine pendant 40 années au cours desquelles il a exercé 5 commandements à la mer, dans l’Océan Indien, l’Océan Pacifique, au sein de l’Escadre de l’Atlantique et de la Force d’Action Navale basée à Toulon.
Il est diplômé de l’école de guerre et du cours supérieur interarmées, du centre des hautes études militaires et de l’institut des hautes études de la Défense Nationale, ainsi que de la « Kennedy School of Government » de l’université américaine de Harvard.
Il a connu 5 affectations d’Officier Général, dont le commandement des forces maritimes et de la zone maritime de l’océan Indien et a terminé sa carrière comme directeur de la Coopération Militaire et de Défense au Quai d’Orsay.
L’Amiral Giraud est le petit fils du Célèbre Général GIRAUD.

Retour sur la conférence d’Antoine BROWAYES, Directeur de recherche au CNRS, au lycée Hoche le 7 octobre 2015

 
 
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Antoine BROWAEYS fait partie des physiciens expérimentateurs (plutôt que théoriciens). Ancien de Hoche (Maths HX et P’ en 1990-92), il a intégré l’ENS de Cachan, et a été Major de l’agrégation de physique. A l’Institut d’Optique de Paris (CNRS), il a réalisé son doctorat (en 2000) puis passé deux ans à Washington (National Institute of Standards and Technology) ; depuis 2010, il est Directeur de recherche au CNRS, à l’Institut d’Optique à Palaiseau, à la tête d’une dizaine de physiciens, et enseigne également à Polytechnique.
Sa conférence du 7 octobre 2015 a porté sur « Le cirque quantique : comment dompter des atomes avec des lasers ».

1. Contexte et bases des recherches d’Antoine BROWAEYS

Le contextede ses recherches est la physique quantique, vieille d’un bon siècle, en préambule à sa conférence, Antoine BROWAEYS rappelle une phrase célèbre de l’une des grandes figures ayant posé les fondements de la mécanique quantique, le Pr. Erwin SCHRÖDINGER déclarant en 1950 qu’on ne peut pas faire d’expériences avec un seul atome….,et Antoine BROWAEYS nous a montré combien les choses ont changé après cette affirmation.
Ses expériences multiples de domptage des atomes utilisent

  • des atomes de rubidium (Rb), qui ont 37 électrons : rappelons que les électrons sont placés, par rapport au noyau de leur atome, sur des orbites de rayon croissant caractérisé par un nombre entier n(d’autant plus élevés que n est grand) et correspondant à autant d’états, de plus en plus « excités (en s’éloignant du noyau) », c’est-à-dire de plus en plus énergétiques ;
  • le laser, émetteur de Lumière Amplifiée par Stimulation d’Emission de Radiations, sert de « fouet du dompteur » émettant quelques mW (milli-Watts), c’est-à-dire à piéger les atomes, à les refroidir (pour réduire leur énergie cinétique), à les voir et à les manipuler,
  • les dits atomes et leurs électrons, qui font partie des objets quantiques, soumis à la physique du même nom.

Elles se déroulent dans le domaine d’application des lois de la physique quantique, dans le royaume des nanomètres et micromètres cube (1 nm = 1 milliardième de mètre ; 1 µm³ = 1 millionième de m³)
Plusieurs grandes expérimentations de capture et d’étude d’objets quantiques ont eu lieu avant celles de l’équipe d’Antoine BROWAEYS, et sont décrites au paragraphe 3.

2. Le concept « ridicule » de SCHRÖDINGER

L’observation des objets quantiques montre que chacun d’eux peut-être « simultanément dans plusieurs états » à la fois, et c’est en apparence aussi paradoxal (et ridicule aux yeux de SCHRÖDINGER) que d’avoir par exemple un même chat simultanément vivant et mort (on sait ainsi que SCHRÖDINGER a laissé son nom à la célèbre expérience de pensée du chat de SCHRÖDINGER).Par exemple,

  • un photon peut « simultanément »suivre deux chemins distincts,
  • en avançant sur un chemin, il peut se « couper en deux puis se recomposer » ,
  • un même électron peut se trouver soit dans une orbite (un étage) soit dans un autre, pouvant être « à la fois dans son état fondamental et dans un état excité ».

D’autre part, même avec des photons préparés de façon identique on ne peut pas prévoir à l’avance leur état à la fin de l’expérience.C’est l’aléatoire caractéristique de la physique quantique.

3. Le piège de H DEHMELT : l’oscillateur à électron unique (1973)

L’électron capturé dans ces expériences est comme une bille dans un bol : pour qu’il y reste il est nécessaire que son énergie soit inférieure à celle lui permettant de sauter au dehors du bol. Pour la maintenir dans cette condition, on utilise la force de LORENTZ en le soumettant à ces champs électro-magnétiques. Ainsi DEHMELT a-t-il pu immobiliser pendant 8 mois un électron et mesurer ses propriétés, notamment son moment magnétique avec une précision fantastique, confirmant à cette occasion les calculs desthéoriciens qui à l’époque était moins précis que l’expérience ; le Prix Nobel a couronné ses travaux.

4. Les captures d’atomes – les apports de l’Institut d’Optique

Historiquement, une méthode pour voir des atomes utilisait un microscope à effet tunnel, permettant de voir la répartition d’atomes sur une surface, mais elle ne permettait pas de voir un atome seul, isolé dans l’espace. Au contraire dans les expériences de l’Institut d’Optique, un faisceau lumineux issu d’un laser est envoyé sur un atome isolé, et on l’observe ainsi à l’aide d’une caméra, pourvu que la fréquence de cette lumière soit résonante avec celle que l’atome peut absorber pour passer d’un de ses états à un autre. L’atome diffuse alors la lumière, il fluoresce.
Actuellement, au laboratoire de l’Institut d’Optique d’A. BROWAEYS, c’est le champ électrique d’un laser qui est utilisés pour créer un dipôle (dans lequel les particules chargées + sont séparées de celles chargées -), tirer l’atome vers le point focal du laser, et le piéger ainsi dans un cube de 1 μm³, après avoir refroidiles atomes tout près du zéro absolu en les bombardant des lumières croisées de plusieurs lasers.
La pince optique ainsi utilisée est bâtie à l’aide des lasers en question, résonnant avec les atomes visés et réalisant ainsi un piège de 1 µcm³, des caméras, les atomes de rubidium à l’état de vapeur. Cette installation exige le concours quelques 3 personnes x années et 300 k€.
Avec les atomes ainsi piégés, le laboratoire de l’Institut d’Optique a pu

  • provoquer des « oscillations de Rabi », c’est-à-dire transférer « sur mesure » 1 électrons d’un niveau (c’est-à-dire d’un état) à un autre,
  • mesurer les forces d’interaction des atomes, dans des expériences où le nombre des atomes et leurs distances respectives varient, et ainsi confirmer par expériences les calculs théoriques (anciens) de Van der Waals.

5. Applications

Grâce à cette ingénierie quantique, trois grandes applications sont déjà en développement :

5.1 La simulation quantique

Sur le plan purement scientifique, elle vise comprendre comment passer des lois de la physique quantique (applicables à « l’infiniment petit », au stade de l’atome) à celle des objets courants, qui est celui des moles de la chimie (rappel : 1 mole = 1023 molécules élémentaires) par le biais de simulation matérielles et non de calculs (trop difficiles à mener).

5.2 Perfectionner des technologies

Sur le plan très pratique (industriel), on peut citer, entre autres retombées de cette simulation quantique, la supraconductivité simulée, qui pourrait permettre de mieux comprendre la supraconductivité à haute température et pourrait notamment être la source de nouveaux procédés de stockage de l’électricité, de renforcements des alliages métalliques, et de gains considérables sur les rendement des moteurs électriques.

5.3 L’ordinateur quantique

En y utilisant les ordinateurs quantiques qui peuvent théoriquement mener plusieurs calculs en parallèle en utilisant les lois de la mécanique quantique – on pourrait accélérer la vitesse de fonctionnement des ordinateur et la résolution des algorithmes, alors que les limites de la miniaturisation continue et croissante des mémoires (Loi de Moore) commencent à se faire sentir ; un ordinateur sensé être fondé sur ces principes est déjà produit au Canada mais ses réels apports innovants, et ceux de ses versions futures, restent encore à prouver.

6. Conclusion

Antoine BROWAEYS nous a ainsi fait découvrir des découvertes récentes de l’infiniment petit, après que Frédéric DAIGNE, lors de la conférence précédente à Hoche, nous avait conduit dans celles de l’infiniment grand (les galaxies), en nous présentant les sursauts gamma, qui parcourent des milliards d’années-lumière. Comment ne pas penser : autour de nous, dans de l’Univers, que d’impressionnantes réalités, démesurées pour nous vers les deux infinis, déjà perçues par Blaise PASCAL !

En conclusion de la conférence, des salves d’applaudissements, puis des questions spontanées, ont fusé de la part des quelques 160 élèves visiblement très intéressés, et des dizaines de professeurs et anciens élèves.
A l’heure de ce compte rendu, nous renouvelons à Antoine nos vifs remerciements.

Téléchargez le diaporama de la présentation en PDF

Les anciens se retrouvent à l’occasion de l’Assemblée générale de l’Association du 13 juin 2015

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Photo prise le 13/06/15 devant la chapelle du lycée Hoche, après la visite du musée historique du lycée.

1er rang, de gauche à droite :
Marie-Louise MERCIER-JOUVE, historienne du lycée Hoche – Pascal ARNOUX, 1977 – Jacques DUREUIL, 1943 – Thomas LEGRAIN, 1990, Président des Anciens de Hoche – Loïc TOUSSAINT DE QUIEVRECOURT, Proviseur du lycée Hoche – Christine DALLOUBEIX, professeur de Physique en PCSI au lycée Hoche, Présidente de l’association des amis du musée historique du lycée Hoche – Pierre COURTOIS, 2010 – Vincent BOURGERIE, 1963 – Alain SALEUR, 1951 – Martial FABRE, 1971.

2ème rang, de gauche à droite :
Romain RICHARD, 1993 – Raymond CLAUDE, 1958 – Dominique BENOIST, 1963 – Guillaume ROBICHEZ, 1964 – Bernard ROUSSIGNOL, 1958 – Philippe CUBAUD, 1977 – Damien AVIGNON, 2010 – Amaury CRISCUOLO, 2010 – Michel ROUET, 1950.

3ème rang, de gauche à droite :
Christophe MANGE, 1978 – Philippe GAUTIER, 1968 – Philippe-Georges CAPELLE, 1963 – Jean FRAGNIER, 1975 – Jean CASANOVA, 1968 – Pierre KLOTZ, 1963 – Bruno SIMONS, 1974 – Pierre-Damien JOURDAIN, 1994 – Thierry GONTARD, 1981.

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Photo prise le 13/06/15 dans le grand amphithéâtre du lycée Hoche, à l’issue de l’Assemblée Générale de l’Association.

1er rang, de gauche à droite :
Cédric DEFFAYET, 1990 – Isabelle MORDANT (née Durvye), 1990 – Thierry GONTARD, 1981 – Gaspar MASSON, 1990 – Pierre-Damien JOURDAIN, 1994 – Stéphane RIO, 1988 – Pascal ARNOUX, 1977 – Hubert JUILLARD, 1990 – Romain RICHARD, 1993 – Nadi BOU HANNA, 1989 – Michel ROUET, 1950 – Martial FABRE, 1971.

2ème rang, de gauche à droite :
Jacques DUREUIL, 1943 – Christophe MANGE, 1978 – Philippe-Georges CAPELLE, 1963 – Philippe GAUTIER, 1975 – Jean-Yves PERIER, 1975 – Philippe CUBAUD, 1977 – Thomas SAUNIER, 1984 – Bernard ROUSSIGNOL, 1958 – Jean-Pierre MAGDALENA, 1954 – Vincent BOURGERIE, 1963 – Guy VIDAL, 1945 – Thomas LEGRAIN, Président des Anciens de Hoche, 1990 – Jean FRAGNIER, 1975 – Jean-Marie BUSCAILHON, 1946 – Alain SALEUR, 1951 – Héléna JAHAN DE LESTANG (née Perroud), 1989 – Louis-Aimé de FOUQUIERES, 1974.