Ce texte résulte de conversations entre deux « vieux routiers » du Lycée Hoche.
Gaston Bataille y a enseigné l’anglais entre 1945 et 1979. Plus récemment, le 20 novembre 2013, il y a exposé ses vues sur la pédagogie de l’anglais à l’invitation des Anciens Elèves ; le lycée l’a reçu à nouveau en octobre 2014 à l’occasion de son centième anniversaire ; il a également présenté en avant-première aux Anciens une grammaire qu’il venait d’achever avec une belle-fille elle aussi enseignante d’anglais.
Daniel Debomy l’a eu comme professeur à cinq reprises (et un an de plus en tant que colleur !) au cours des onze années qu’il a passées à Hoche entre classe primaire et classes préparatoires de 1955 à 1966 ; il en a gardé un goût de l’anglais et plus largement des langues, qui l’a amené à musarder quelque peu du côté de celles du Nord de l’Europe puis, en réactivant de vieux souvenirs de latin, d’acquérir un modeste mais utile entendement passif des langues romanes – tout cela lui ayant été précieux dans sa vie professionnelle, en plus de l’intérêt personnel qu’il y a trouvé.
En arrière-plan de ces conversations, souvent une même interrogation : qu’est-ce qui fait que les Français (sans doute parmi les plus patauds en Europe à cet égard…) éprouvent tant de difficultés à se colleter avec les langues étrangères – et comment y porter remède ?
Le professeur coauteur de ces lignes, qui déplore des conceptions à son avis erronées dans les dogmes officiels et les méthodes traditionnellement préconisées pour l’enseignement de l’anglais, a évoqué lors de la réunion de novembre 2013 une partie des moyens et outils pédagogiques qu’il a élaborés au cours de sa carrière : moyens visant entre autres à stimuler la participation des élèves en les faisant sortir de leur passivité.
Faire participer, éveiller l’intérêt, susciter l’adhésion, ce sont là naturellement des buts que poursuit le pédagogue face à sa classe.
C’est une question que son ancien élève a aussi rencontrée dans un métier tout autre, en pratiquant (pour résumer) les études d’opinion – notamment études qualitatives qui reposent sur des techniques psychosociologiques d’interview pour identifier et comprendre les ressorts des opinions et des attitudes.
Réalisant de telles études en particulier pour la Commission européenne depuis les années de la présidence de M. Jacques Delors, il a été amené à analyser ce que les citoyens européens savent, pensent, comprennent ou ne comprennent pas, attendent ou craignent, etc. de l’Union européenne et de ses politiques ; l’objectif en étant d’aider à orienter les actions d’information sur ces sujets complexes – actions qui doivent en outre être déclinées en plus de vingt langues et en tenant compte de la diversité des sensibilités nationales.
Qu’il s’agisse d’enseignement, d’information sociopolitique, ou d’autres domaines qui mettent en jeu, au sens le plus large, la communication, la recherche de l’efficacité implique de prendre en compte la psychologie de ceux auxquels on destine le message, avec à la fois leurs logiques propres (quand bien même elles seraient a priori, aux yeux de l’émetteur, illogiques…) et leurs subjectivités. En d’autres termes, il faut s’adresser en même temps au rationnel et à l’affectif, expliquer mais tout autant faire sentir.
Formulé en ces termes généraux cela sonne comme une évidence ; en quoi le recours à l’étymologie peut y concourir pour mieux « accrocher » l’attention et l’intérêt de ceux qui apprennent une langue a été plus précisément l’objet des échanges de vues entre les deux auteurs de ce texte.
Le premier caresse depuis longtemps le projet d’un dictionnaire qui, sans être un dictionnaire étymologique, ordonne les mots du vocabulaire selon leurs racines : tâche considérable qui dépasse évidemment les moyens d’un seul, mais qui pourrait voir le jour sous la forme plus restreinte d’un lexique. Du point de vue pédagogique qui nous occupe ici, nous essaierons de montrer comment une démarche qui consiste à attirer l’attention sur des termes qui ont des racines particulièrement signifiantes et expressives peut, à notre sens, aider à toucher le « cerveau droit » en même temps que le « cerveau gauche » (pour prendre une image familière quoique, paraît-il, trop simpliste du fonctionnement de cet organe) des élèves ou des étudiants.
Le second a souvent été frappé, dans sa fréquentation plus ou moins poussée de diverses langues, d’y relever des racines communes, et de trouver plaisir à ces découvertes en même temps que facilitation de l’abord d’autres langues proches.
L’article téléchargeable qui suit vise à illustrer ces propos par quelques exemples. Si ceux-ci apparaissaient au lecteur comme n’étant pas les plus appropriés, ou comportaient des erreurs, c’est au seul usager amateur de la langue (qui, mieux équipé en moyens de saisie de textes, a produit la version finale de celui-ci), et non au professeur auquel ces erreurs auraient échappé, qu’il conviendrait d’en imputer la responsabilité.
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Gaston Bataille, professeur d’anglais au lycée Hoche entre 1945 et 1978 et Daniel Debomy, élève à Hoche entre 1955 et 1966